Catégorie : <span>Art et culture</span>

Brotherhood Spirit: une critique

Brotherhood Spirit est le premier long métrage réalisé par Yoann Roig. Et disons-le tout de suite, c’est une première création réussie. Les images sont magnifiques, les plans s’enchaînent fluidement et de manière cohérente. On retiendra notamment une série de « runs » à Mexico City, entre forêt et ruines. Placés immédiatement après un paysage urbain, le contraste est intéressant et donne une atmosphère sauvage. Celle-ci est renforcée par l’utilisation d’une musique tribale et l’entrelacement du parkour avec des séquences de danse. On pourra noter également quelques passages amusants, comme ce traceur qui, entré dans un fort militaire abandonné sans s’être posé de questions, ne parvient plus à en sortir. Le film a aussi eu le mérite de redonner un élan de motivation aux traceurs.euses de la région, leur a “donné envie de bouger”.

On notera également le tour de force qui est de réaliser un documentaire avec si peu de personnel, et probablement de moyens. Seules deux personnes viennent prêter main-forte à Yoann en post-production (sans compter les voix-off). […]

La vidéo comme méthode d’entrainement

La vidéo a une grande importance dans le parkour. Notre pratique ne s’est pas répandue sur la surface du globe sur la base de journaux papier, d’enseignants spécifiquement formés ou de grandes fédérations. Le cinéma, les reportages télévisés mais également la multitude de vidéos amateures ont permis sa diffusion, l’émergence et l’apprentissage de patterns techniques, et ont contribué à motiver des jeunes et moins jeunes à tenter l’aventure. Ici, je vais développer un thème peut-être un peu curieux : la vidéo comme méthode d’entrainement et ses effets sur la (ma) motivation.

Il y a bien longtemps, j’ai amorcé une série de vidéos qui présentaient chaque fois un différent « spot » de ma ville. Le but était de montrer différents lieux, pas nécessairement les spots les plus prisés des traceurs, et montrer ce que l’on peut y faire, afin de les valoriser comme espaces de jeu. Le but n’était pas une exhaustivité absolue. Mais le fait de vouloir montrer la diversité de ce qu’on pouvait faire d’un même lieu m’amenait à me rapprocher des limites de ce que je pouvais imaginer et réaliser avec mon corps à un moment donné, dans un espace donné. […]

RAPortage 4 – Extrême gravité



Hier avait lieu à La Vilette
le travestissement du parkour fait sous la forme d’une compèt’,
à l’origine il n’y a que de soi qu’on va à la conquête,
pas du public, et du fric, et du titre que les jurys te remettent,
mais hélas hier c’était l’objet,
et le clou d’un spectacle faisant le culte du sujet,
la pratique en débâcle tandis que trois imposteurs jugeaient
les performances des mecs parce qu’il fallait bien qu’il y ait échecs et succès,
et le présentateur qui suçait
les soit-disant traceurs -car ça n’en est pas, mais ça tu le sais !-,
les qualifiant de super-héros à plusieurs reprises,
si Spiderman l’entendait, gros, il trouverait à juste titre qu’on le méprise,
devant une foule infantilisée
qu’on mobilisait sans cesse avec moult débilités,
on frisait le pire de ce qu’ils diffusent sur l’écran télévisé,
pas à rougir devant Nabila et « Les Anges de la télé-réalité » !
En réalité, c’était peut-être pire:
des demoiselles dénudées dansant sur du son à s’occire,
une mise en scène, oui, mais hélas c’était pas du Shakespeare,
les conneries qu’ils ont dit on pollué jusqu’à l’air que je respire !
« Je vous rappelle qu’on se bat pour une place, pour être le champion officiel ! »,
moi je vois ça comme une farce, comme une farce gravitationnelle :
les types volaient, c’est sûr, mais ils volaient le nom d’une pratique
pour l’offrir en pâture à toutes les raclures des infrastructures médiatiques !
Que de show, de m’as-tu-vus, que d’égos,
que d’athlètes mendiant les applaudissements pour lancer les sauts,
que de volonté mise pour montrer qu’on est pas tous égaux,
que d’imbécilité suscitée, ô combien c’était sot !
Le parkour décliné en divertissement abrutissant,
confiné entre des barrières et des vigiles oppressants,
avec tracé et mouvements imposés aux participants,
que reste-t-il de subversif dans ce parkour conjugué au présent ?
On pressent déjà l’avenir formidable
réservé à tout art dans la mesure où il devient rentable,
lorsque Redbull notamment vient s’inviter à la table,
voit son logo apparaissant sur les structures modulables,
envahissant l’évènement de sa boisson exécrable,
censée donner aux participants une puissance remarquable,
entre sexisme odrinaire, et runs médiocres, voire minables,
Xtreme Gravity hier c’était la preuve que la récupération est interminable !

De l’album RAPortages, paru le 21 décembre 2014 (L’1consolable / Teddy Roxpin)
Mixé et masterisé par L’1consolable chez lui à Paris.
© Tous droits réservés

Lines

Dans cette vidéo (réalisée en Février2015) j’ai décidé de travailler sur les lignes de l’environnement urbain. En me concentrant sur les cadrages,  le côté graphique, les plans de face, la perspective, la symétrie ou les formes géométriques…
Observer ce qui m’entoure de cette manière fut très interessant et enrichissant. notamment dans des lieux qui me sont familiers mais que je n’avais jamais pris le temps de réelement contempler.

Certains mouvements sont justement nés de cette recherche graphique, de ce concept. Il m’arrivait de trouvé un cadrage qui me plaisait, puis de réfléchir aux mouvements qui pourraient s’y adapter, alors que nous procédons généralement dans le sens inverse.

Cela m’a permis de développer autrement ma créativité.

J’ai aussi composé la musique de cette vidéo ( à partir d’une mélodie réalisée auparavant avec Inès Othmani ).  Afin que le son corresponde vraiment au rythme des mouvements, à l’atmosphère, et aux émotions que je voulais transmettre.

Même si le Parkour transforme notre perception de l’environnement, ce projet m’a poussé à aller encore plus loin. En m’éloignant de l’idée de vitesse, de performance, pour simplement prendre le temps de regarder attentivement ce qui m’entoure.

On peut retrouver la musique ici :

Réflexion sur les « Strides » ( Enjambées, Foulées )

A plusieures reprises j’ai vu des gens s’étonner de la possibilité d’encaisser « l’impact » de ce genre de saut sur une seule jambe. Je définierai chaque appui comme un contact le plus léger possible plutôt qu’un impact. Car je ne m’arrête pas du tout sur chacun de ces appuis, au contraire.

J’encaisse l’impact induit par ces mouvements grâce à la course qui suit, permettant de dissiper toute l’énergie accumulée de façon dégressive ( comme une roulade  après un saut de fond ). Même lorsque j’amortis le dernier mouvement pieds joints et que je ralentis de façon beaucoup plus nette il m’arrive souvent d’être emporté vers l’avant, de ne pas stabiliser le mouvement.

J’essaye de redistribuer la force avec l’ensemble de mon corps même s’il n’y a qu’une jambe en appui avec l’obstacle à un moment donné. La position et la force de mes bras, mes épaules, mon bassin et ma jambe libre ont autant d’importance que la force que je met dans la jambe qui semble « encaisser ».
Je commence avec une certaine énergie et je relance le mouvement à chaque appui pour la conserver au maximum.
Plus je prends de vitesse, plus j’augmente la force horizontale qui entraine mon corps vers l’avant, moins je subis l’impact vertical à chaque concact, induit par la gravité.

Je pense que strides sont parfois considérés comme une succession de sauts, que l’on pourrait isoler les uns des autres, alors qu’ils devraient être perçus comme un ensemble.
Lorsqu’on marche on se laisse constament tomber vers l’avant avant de rattraper notre chute. On donne une énergie initiale qu’on conserve ensuite, on est constament en contact avec le sol. Lorsqu’on sprint la même action se produit à une vitesse beaucoup plus importante. Plus la vitesse augmente, plus les foulées s’agrandissent, plus le temps en contact avec le sol diminue. Je cherche à me rapprocher de cette sensation autant que possible.

Il faut cependant être capable de comprendre et de travailler la technique de chaque foulée. Et je pense qu’il est beaucoup plus pertinent de travailler sa technique de course, de l’analyser, la décomposer à l’arrêt, puis progressivement avec de plus en plus de vitesse, au lieu de se concentrer directement sur sa technique de saut.

Nous apprenons à marcher, puis à courir, puis à sauter. J’ai l’impression que les premières étapes sont trop souvent négligées. La course n’est pas assez mise en avant en tant que base dans le milieu du Parkour alors qu’elle est surement la technique la plus utilisée.

Le Parkour, la vie.

Bien que l’activité soit en plein boom, le terme de « parkour » (ou de « traceur », le pratiquant de parkour) ne parle pas encore à tout le monde. Wikipédia parle d’une « activité physique qui vise à un déplacement libre et efficace dans tous types d’environnements, et en particulier hors des voies de passage préétablies ». La fédération de parkour décrit une « activité physique consistant à se déplacer efficacement grâce à ses seules capacités motrices, dans différents types d’environnements ». On entend souvent que c’est « l’art de se déplacer d’un point A à un point B de la manière la plus efficace possible ». Souvent, le stéréotype classique se représente des « jeunes casse-cous qui grimpent, courent et sautent partout, en particulier en faisant des saltos d’immeuble en immeuble ».

J’y vois quant-à moi un objet bien plus simple et bien plus large. Le parkour commence dès lors que confronté à un obstacle menaçant votre avancée, vous choisissez de ne pas faire demi-tour – du moins, pas d’office. […]